Le petit prince s'en fut revoir
les roses: - Vous n'êtes pas du
tout semblables à ma rose, vous n'êtes rien encore, leur dit-il. Personne ne vous a
apprivoisées et vous n'avez apprivoisé poersonne. Vous êtes comme était mon
renard. Ce n'était qu'un renard semblable à cent mille autres. Mais j'en ai fait
mon ami, et il est maintenant unique au monde.
Et les roses étaient bien gênées.
- Vous êtes belles, mais vous êtes
vides, leur dit-il encore. On ne peut pas mourir pour vous. Bien sûr, ma rose à moi, un
passant ordinaire croirait qu'elle vous ressemble. Mais à elle seule elle est plus
importante que vous toutes, puisque c'est elle que j'ai arrosée. Puisque c'est elle
que j'ai mise sous globe. Puisque c'est elle que j'ai abritée par le paravent. Puisque
c'est elle dont j'ai tué les chenilles (sauf les deux ou trois pour les papillons).
Puisque c'est elle que j'ai écouté se plaindre, ou se vanter, ou même quelquefois se
taire. Puisque c'est ma rose.
Antoine de Saint-Exupéry,
Le petit prince, xxi |
El
principito se fue a ver nuevamente a las rosas:
No sois en absoluto parecidas a mi
rosa: no sois nada aún les dijo. Nadie os ha domesticado y no habéis
domesticado a nadie. Sois como era mi zorro. No era más que un zorro semejante a cien mil
otros. Pero yo le hice mi amigo y ahora es único en el mundo.
Y las rosas se sintieron bien molestas.
Sois bellas, pero estáis vacías
les dijo todavía. No se puede morir por vosotras. Sin duda que un transeúnte
común creerá que mi rosa se os parece. Pero ella sola es más importante que todas
vosotras, puesto que es ella la rosa a quien he regado. Puesto que es ella la rosa a quien
puse bajo un globo. Puesto que es ella la rosa a quien abrigué con el biombo. Puesto que
es ella la rosa a quien cuyas orugas maté (salvo las dos o tres que se hicieron
mariposas). Puesto que es ella la rosa a quien escuché quejarse, o alabarse, o aún,
algunas veces, callarse. Puesto que ella es mi rosa.
Antoine de Saint-Exupéry, El
principito, xxi
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